« La femme Algérienne dans les services de santé à travers le temps ».


Le 05-03-2018


Contribution exclusive de Si Djoudi ATTOUMI, Officier de l’ALN, Historien et Ex Directeur des Services de Santé, dédiée à toutes les employées du CHU de Bejaia à l’occasion du 08 Mars 2018.

La femme algérienne a réussi à briser sa coquille pour conquérir sa place dans les services de santé, principalement au lendemain de la deuxième guerre mondiale. Malgré les conditions défavorables de leur statut, quelques jeunes filles ont réussi à arracher leur place au sein des universités françaises, comme le Dr. Nefissa Hamoud qui deviendra le premier médecin chef de la Wilaya III dès le début de 1956, mais surtout au sein de certaines écoles paramédicales de Constantine, de Sétif, d'Alger, de Blida, d'Oran, de Ain El Hammam...
Plusieurs d'entre elles allaient émerger et jouer un rôle important au sein de notre guerre de libération. Nous pouvons citer Benmahmoud Akila, Merieme Bouattoura, Louisa Attouche(en vie), Malika Gaid, Larbi Fifi (en vie) etc...
Au déclenchement de la guerre de libération , ces jeunes filles rejoignirent les maquis pour la plupart. Mues par l'amour de la patrie, elles ne pouvaient rester à l'écart de la lutte du peuple algérien. Malgré leur condition féminine, elles ont accepté de se sacrifier aux côtés de leurs frères moudjahidin.
Parmi ces braves, nous pouvons citer en Kabylie Louisa Attouche, Drifa Attif, Fifi, Danielle Mine Amrane, Aicha Haddad, Malika Gaid, Raymonde Peschard, Fifi, Harchi Messaouda, Beladjila Fatma Zohra, Meriem Bouattoura, Chebah Fatma dite "bibicha" et tant d'autres.
Dès les premiers jours de la guerre, les maquis avaient un besoin crucial en personnel soignant. Les moudjahidine et les civils blessés manquaient de soins ou furent dirigés clandestinement dans certains cabinets médicaux ou l'on faisait venir des médecins algériens et quelques rares français pour faire face à cette nouvelle discipline qui est la chirurgie de guerre.
L'arrivée de ces jeunes infirmières au sein des services de santé de l'ALN constituaient une aide appréciable pour les responsables sanitaires. Des infirmeries furent implantées un peu partout; chaque douar devait recevoir cette structure pour répondre aux besoins des malades et des blessés de guerre.
Si elles n'étaient pas légion dans les maquis, elles vinrent renforcer les infirmiers formés sur place par les Dr. Laliam Mustapha, Mohamed Boudaoud, Nefissa Hamoud, Belhocine et Ahmed Benabid le dernier médecin-chef de la Wilaya III.
Leur mission consistait à aller au devant des blessés et des malades pour leur prodiguer les premiers soins avant de les orienter vers les infirmeries où ils peuvent trouver un médecin pour des soins plus compétents. Il fallait surtout faire face à l'urgence.
En plus, elles faisaient des tournées à travers les villages en milieu rural pour soigner les malades, réunir les femmes pour prodiguer des soins et des conseils sur ce qu'on appelle aujourd'hui l'éducation sanitaire; Elles furent d'un grand apport pour le développement des services de santé de l'ALN.
Cependant, leur mission ne fut pas de longue durée, car à l'approche des grandes opérations ennemies, le colonel Amirouche a préféré leur épargner le choc des durs affrontements entre les soldats et les moudjahidine en prévision des opérations Challe. Vulnérables qu'elles étaient de par leur condition féminine, elles furent dirigées sur la Tunisie. Malheureusement, l'ennemi étant toujours aux aguets, leur convoi fut intercepté à Draa Erih (Bordj Bou Arreridj) le 6 septembre 1957; Raymonde Pescard et le Dr. Belhocine furent tués, les Dr. Nefissa Hamoud et Laliam Mustapha furent capturés, ainsi que Djamila Danielle Amrane.
Malika Gaid tomba au champ d'honneur en 1958 dans la région de Mechdallah en essayant de protéger ses blessés, alors que Louisa Attouche, Attif Drifa et Aicha Haddad furent capturées. Depuis cette date, les services de santé de l'ALN furent assurés courageusement par des infirmiers de l'ALN en bravant toutes les insuffisances, comme l'absence de médicaments, de matériel et d'un potentiel humain compétent. Ils méritent tous notre reconnaissance d'avoir fait face à tous les besoins, à chaque fois qu'ils sont sollicités, et ce jusqu'à la fin de la guerre.
Aujourd'hui, toutes ces femmes et tous ces hommes qui ont eu à braver l'ennemi, un ennemi barbare et sans aucun sentiment méritent notre profond hommage. Combien de blessés furent achevés, que ce soit sur les lieux des combats ou dans des centres de tortures ? Combien d'infirmières et d'infirmiers sont tombés en essayant de protéger leurs blessés. L'Histoire de notre guerre de libération finira par les montrer au grand jour.

Signé : Djoudi ATTOUMI.

Bureau de l’Information, de la Communication et d’Audio-visuel du CHU de Bejaia

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